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Peintures

période

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La collection de peintures du château de Pau se constitue et s'enrichit autour de deux thématiques principales, Henri IV et son époque, le château de Pau et son paysage...

Lors des travaux de restauration du château sous Louis-Philippe, les architectes du roi, dans leur souci de reconstituer un décor Renaissance privilégiant la tapisserie, ne firent venir à Pau aucun tableau des collections royales. C'est seulement en 1860 que deux peintures furent envoyées pour orner les murs du salon de famille, jugés trop nus par le ministre alors en charge des palais impériaux. L'assassinat d'Henri IV de Gustave Housez et Henri IV dans la tour de Saint-Germain-des-Prés d'Eugène Giraud devaient ainsi devenir le premier embryon de la collection de peintures du musée qui comprend actuellement une centaine d'œuvres du XVIe au XXe siècle.

Cette collection fut constituée et enrichie à partir de 1945 par les conservateurs successifs autour de deux thématiques principales, Henri IV et son époque, le château de Pau et son paysage.

Une partie de ces œuvres est présentée dans le parcours de visite : portraits des XVIe-début XVIIe siècles et peintures troubadour et romantiques, ou à l’occasion d’expositions temporaires.

Les objets

Peinture
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Antoine de Bourbon

1557

Ce petit panneau de chêne présente un superbe portrait du père d'Henri IV, Antoine de Bourbon (1518-1562). Peint en 1557 - la date figure en partie supérieure droite du tableau - il montre ce haut personnage, premier prince du sang, deux ans après son accession au trône de Navarre.

L'extrême finesse de ce portrait, le délicat modelé du visage, le regard pénétrant, l'élégance impeccable du costume, l'alliance subtile du raffinement et de la sévérité, témoignent de l'art de François Clouet. La posture du royal modèle, tourné légèrement de trois quarts, permet de le rapprocher du beau dessin réalisé par ce peintre et conservé au musée Condé à Chantilly. Le Musée national du château de Pau possède une autre version de ce tableau, sans doute une copie plus tardive.

Peinture
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Henri roi de Navarre

France, vers 1575-1576

C’est un portrait un peu inhabituel d’Henri IV qui nous est proposé ici. On y découvre le prince glabre et d’une élégance bien digne de la cour des Valois : collier à trois rangs, cape brodée, toque à plumet ornée de quatre rubis, rien ne manque à cette parure princière. C’est qu’Henri, devenu roi de Navarre depuis la mort de sa mère, Jeanne d’Albret (juin 1572), est ici représenté dans les derniers mois de sa captivité à la cour de France, captivité qui suivit son mariage avec Marguerite de Valois et le massacre de la Saint-Barthélemy (août 1572).

En février 1576, il réussit en effet à s’échapper de la cour, regagne ses domaines gascons et prend la tête du parti protestant. Anonyme, ce beau portrait du jeune roi de Navarre témoigne de la vitalité de l’art du portrait dans la France du XVIe siècle.

Peinture
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Henri IV s'appuie sur la Religion pour donner la paix à la France

France, dernier quart du XVIe siècle

Cette petite huile sur bois est l'une des peintures les plus emblématiques des collections henriciennes du château de Pau. C'est aussi une scène unique, qui a donné lieu à de multiples écrits. Sur l'interprétation de la peinture, il n'y a pas de doute : il s'agit d'une allégorie de la paix donnée au royaume de France par Henri IV, grâce au soutien de la Religion. Sur la datation du tableau, sur l'identité de l'artiste qui le peignit, sur la religion initialement représentée – Catholique ? Protestante ? -, sur le modèle féminin qui posa pour l'incarner, plusieurs hypothèses ont été émises. Observons attentivement la peinture. Au centre d'un paysage peu identifiable, Henri IV, le visage émacié, fixe le spectateur d'un air grave. Il est représenté debout, en costume d'imperator romain. Sur ses épaules, flotte un long manteau fleurdelysé, retenu sur la poitrine par une broche d'or. Il est donc roi de France. Au-dessus de lui, sept angelots ou putti emportent dans les nues les armes du souverain : bouclier à tête de Méduse, gantelets, lance, casque à panache blanc, écharpe blanche, morceaux de cuirasse, épée dressée. Le roi guerrier est désarmé. Le message est clair : le temps des batailles est achevé, il doit laisser place à celui de la paix. Henri IV est entouré de deux figures féminines. À sa droite, semblant accourir, les yeux levés vers lui, la main gauche sur le coeur, c'est la France. Le roi lui remet un rameau d'olivier, symbole de cette paix enfin retrouvée. A la gauche du souverain, une autre femme est assise. Un léger sourire aux lèvres, elle regarde calmement dans la même direction que lui et il a posé une main assurée sur son épaule. C'est la Religion qui sert ainsi d'appui au roi. On ne peut en douter. Elle en porte tous les attributs : sur les genoux, elle tient une Bible ouverte, sur laquelle est posé un calice surmonté d'une hostie ; dans sa main droite, est placé un crucifix. Tout à la fois portrait royal et allégorie, ce tableau glorifie l'action d'Henri IV, roi de guerre devenu roi de paix pour le plus grand bien de son royaume. Des questions se posent toutefois sur sa datation et son auteur : on a pu rapprocher le visage du roi - ce visage long, émacié, à la barbiche pointue et au regard aigu - d'un portrait disparu, peint en 1587 par François II Bunel, et seulement connu par un dessin. Selon cette hypothèse, le tableau pourrait dater des toutes premières années du règne d'Henri IV, autour de 1590. La religion représentée serait donc la religion protestante, puisque le roi ne se convertit au catholicisme qu'en juillet 1593. L'idée est d'autant plus séduisante que les attributs indiscutablement catholiques de cette religion (calice, hostie, crucifix) sont des ajouts, certes très anciens, mais tout de même postérieurs de quelques années à la réalisation du tableau. D'autres éléments plaident toutefois pour une tout autre hypothèse et une datation un peu plus tardive : nous serions après 1593, dans la dernière décennie du XVIe siècle et la religion serait bien, dès l'origine, catholique. Les ajouts ne seraient là que pour rendre irréfutable son identification. C'est que l'on peut reconnaître en la figure féminine qui l'incarne les traits de la belle Gabrielle d'Estrées, maîtresse d'Henri IV, dont l'influence fut décisive dans la conversion du roi. La peinture serait donc à mettre en rapport avec la double action pacificatrice du souverain qui se concrétisa en 1598 par la paix de Vervins avec l'Espagne et par l'édit de Nantes. Cette précieuse petite huile sur bois, avec tous ses mystères, peut être admirée dans le parcours de la visite, au second étage du musée national, dans le cabinet des peintures XVIe-XVIIe siècles, dit Cabinet Bourbon.

 

Peinture
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Catherine de Médicis

France, fin du XVIe siècle

En 2008, une petite peinture sur panneau est entrée dans les collections du musée national, grâce à la générosité d’une Amie du château de Pau : un portrait en buste de la reine Catherine de Médicis (1519-1589), épouse du roi de France, Henri II et mère des trois derniers rois Valois, François II, Charles IX et Henri III. Cette œuvre est à rapprocher d'un type de portrait officiel de la reine dont on connaît de nombreux exemplaires dessinés par François Clouet, ainsi qu'une dizaine de versions peintes et des miniatures. Elle apparaît en vêtements de deuil, selon une iconographie presque figée et quasi-traditionnelle pour cette reine, devenue veuve à 40 ans, qui devait prendre en mains les destinées du royaume de France pendant les années terribles des guerres de Religion. Elle porte la coiffe de deuil - un chaperon rigide à bords arqués et pointe sur le front, recouvert par un long voile tombant dans le dos -, qui encadre son visage encore jeune, aux lèvres bien ourlées et aux yeux perçants. La fraise courte, d'une blancheur immaculée, tranche sur le noir profond du vêtement. Ce portrait en buste se détache sur un fond uni de couleur verte. La peinture, qui devait être originellement de format carré, se distingue par une grande qualité d’exécution, mise en évidence par une restauration longue, méticuleuse et délicate, qui a redonné à cette œuvre un aspect qu’elle avait perdu au fil du temps. Initialement considérée comme une version un peu tardive, du début du XVIIe siècle, elle peut aujourd'hui être replacée dans un contexte d’exécution proche de la fin de la vie de François Clouet. Lorsque le portrait de Catherine de Médicis a intégré les collections du musée, il a été confié à des restaurateurs spécialisés. La présence d’une fente dans le panneau de chêne faisait craindre pour la pérennité de l'œuvre. Un vernis jauni ainsi que d’importants repeints en gênaient la lecture. La restauration a été menée par Françoise et Christian Morin, restaurateurs de peinture à Bergerac. Leur étude attentive a permis de constater qu'il n'y avait pas de risque important pour la conservation : la fente du panneau, ancienne, était stabilisée. La restauration a donc essentiellement eu pour but d’améliorer l’aspect esthétique de l’œuvre, en éliminant les anciennes restaurations qui l'avaient dénaturée. Après nettoyage minutieux et allégement des vernis, les carnations ont retrouvé leur éclat, les traits du visage se sont affinés; le fond vert comme les vêtements noirs ont gagné en profondeur et en velouté.

 

Peinture
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Procession de la ligue

France

La scène représente l’une des dernières processions organisées à Paris, le 4 février 1593, par la Ligue, union des catholiques les plus intransigeants. La Sainte Ligue s’est formée au plus fort des guerres de religion et en 1589, elle n’accepte pas l’accession au trône de France d’un protestant, Henri IV. Elle le combat comme elle a combattu son prédécesseur, Henri III, accusé d’une trop grande tolérance religieuse et qui a fait assassiner l’un de ses chefs, le duc de Guise. Dans Paris, ville capitale qui se refuse à son nouveau roi, les spectaculaires processions de religieux en armes sont un moyen de faire régner la terreur sur la population et de montrer la détermination des ultra-catholiques. Le thème de la procession de la Ligue est habilement exploité par la propagande hostile à la Ligue parisienne. Popularisé par les poètes de la Satyre Ménippée (1593), ce thème nourrit aussi toute une famille de peintures dont la paternité est initialement attribuée à François Bunel (vers 1552-vers 1599), artiste fidèle à Henri de Navarre dès ses commencements politiques. Dans cet ensemble peint dont les principaux éléments se trouvent aux musées de Rouen (collection Baderou), Bourges, Valenciennes, au château de Versailles ou encore à Bâle, l'œuvre récemment acquise se signale par sa qualité soignée, le maniement judicieux des couleurs, des affinités vivantes avec l'inspiration théâtrale.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Peinture
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Portrait d'Henri IV en Mars

Henri IV dit "en Mars" Vers 1605-1606

 

C'est un Henri IV athlétique et triomphant que l'on peut admirer sur ce portrait fameux, successivement attribué à Ambroise Dubois puis à Jacob Bunel, deux des peintres du roi appartenant à la seconde école de Fontainebleau. Datant des premières années du XVIIe siècle (vers 1605-1606), cette grande huile sur toile a sans doute appartenu au décor rénové de l'un des palais du roi. Henri IV y est représenté en empereur, triomphateur d'ennemis dont il foule aux pieds les dépouilles, armures, casques, armes.

 

La tête couronnée de lauriers, tenant le bâton de commandement dans la main droite, le roi est revêtu d'une armure d'un rose soutenu qui contraste fortement avec le vert des rideaux de fond. Le visage d'Henri IV, très expressif, aux cheveux et barbe grisonnant, aux fines rides et léger sourire est celui d'un souverain, certes triomphant, mais aussi bienveillant dont le règne se veut pacificateur.

Peinture
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Allégorie autour d'un buste d'Henri IV et d'un médaillon représentant la comtesse de Gramont

Commande de la ville de Pau à l'artiste, vers 1776

Cette charmante étude est parfaitement située dans un contexte historique local : la fin de la crise parlementaire ayant agité le Béarn pendant dix ans. C’est pour remercier Sophie de Faoux, comtesse de Gramont, pour l'action qu'elle avait menée en faveur du retour des parlementaires palois en disgrâce, que les représentants de la ville de Pau décidèrent de lui offrir un tableau allégorique commémorant cet épisode et son rôle dans l'affaire. Le plan de cette composition fut même soigneusement établi en assemblée des notables, où l’on décida de la faire exécuter « par un des plus habiles peintres » du temps. Ce devait être le peintre académique Nicolas-Guy Brenet. Si la peinture définitive, remise à la comtesse de Gramont en 1778, a disparu, on n’en connaît pas moins de trois esquisses. Outre les qualités artistiques de cette œuvre, au trait léger et enlevé, l’intérêt de cette peinture réside aussi dans la représentation – l’une des premières connues - de la carapace de tortue, berceau légendaire d’Henri IV.

Peinture
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Henri IV égaré dans une forge

1806

La scène représentée sur cette petite toile est une variation sur le célèbre épisode de La Partie de chasse d'Henri IV, pièce de théâtre à succès du chansonnier Charles Collé au XVIIIe siècle qui montre Henri IV égaré s'invitant incognito chez des paysans. Il n'est toutefois pas question de forge ni de forgeron dans cette Partie de chasse. C'est Marius Granet qui a ainsi renouvelé et enrichi la légende henricienne, d'un épisode inédit...

Cette peinture datant de 1806 s'inscrit dans le courant pictural qui amènera l'artiste à s'intéresser aux architectures intérieures et aux ruines. Le savant jeu d'ombres qui sculpte l'intérieur de la forge est nuancé par des taches de verdure et le carré de lumière émanant du toit vient opportunément éclairer les personnages, dont le roi, très reconnaissable à son profil et à son panache.

 

Peinture
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Don Pedro de Tolède baisant l'épée d'Henri IV

1819

 

Jean-Auguste-Dominique Ingres a montré un intérêt constant pour l'histoire et la légende d'Henri IV  : il releva ainsi quatorze sujets dans l'Histoire de Henri le Grand de Hardouin Beaumont de Péréfixe et d'autres ouvrages historiques. Le thème illustré par ce tableau est le suivant : l'ambassadeur d'Espagne, don Pedro de Tolède croisant un page qui portait l'épée d'Henri IV mit genoux à terre devant lui pour, selon ses propres mots, "baiser l'épée la plus glorieuse de la chrétienté". Bel hommage d'un homme et d'un pays dont les relations avec la France et son roi étaient pourtant difficiles !

   

Cette anecdote attira plus particulièrement l'attention du peintre puisqu'on connaît pas moins de quatre versions de cette scène, dont une de 1820 a été récemment acquise pour le Louvre d'Abou Dhabi. La première version, présentée au Salon de 1814, ayant disparu, celle de Pau est la plus ancienne aujourd'hui conservée. C'est aussi la plus proche de l'original. Elle fut donnée par Ingres à son ami le peintre Jean Alaux pour lequel il la réalisa en 1819. 

Peinture
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La Naissance de Henri IV

1827

Dans la nuit du 12 au 13 décembre 1553, naissait au château de Pau le futur Henri IV de France et de Navarre. Cet événement historique devait connaître une résonance lointaine, en 1827, lors du Salon où Eugène Devéria présenta une grande peinture intitulée La Naissance de Henri IV. Le peintre n’a que 22 ans. Son tableau fait sensation. Il est même le clou de l’exposition. Le Salon de 1827, où sont aussi présentés le Supplice de Mazeppa de Louis Boulanger et la Mort de Sardanapale d’Eugène Delacroix, marque alors une véritable rupture artistique : on parlera longtemps « d’Ecole de 1827 » et c'est Eugène Devéria qui apparait alors en chef de file de cette école. La présentation au Salon, un jalon essentiel dans une carrière artistique Organisé sous l’égide de la direction des Musées royaux, le Salon présente - au sein même du musée du Louvre jusqu’en 1849 - la production des "artistes vivants" et constitue un événement artistique très couru. Sous la Restauration, comme plus tard sous la Monarchie de Juillet, il est aussi l’occasion pour le souverain d’affirmer son rôle de mécène et de protecteur des arts dans la lignée de ses illustres prédécesseurs. Les oeuvres qui ont connu le succès au Salon sont acquises par l’Etat pour le musée du Luxembourg. Par contre, malheur à celles qui ont déplu ou fait scandale ! Eugène Devéria a déjà présenté des tableaux au Salon de 1824. Sans grand succès. En 1825 et 1826, cette manifestation n'a pas eu lieu. C’est dire l’importance du Salon de 1827 pour un artiste comme lui qui n’a pas d’autre possibilité de montrer ses œuvres, de se faire connaître… et de recevoir des commandes. Lorsque le Salon est inauguré le 4 novembre 1827, jour de la fête du roi Charles X, Eugène Devéria travaille encore à sa Naissance de Henri IV dans l’atelier qu’il partage depuis deux ans avec son condisciple Louis Boulanger. Malgré un travail ardent, le jeune peintre, tenaillé par la nécessité qui l’oblige à réaliser des travaux alimentaires, n’arrive pas à terminer son œuvre à temps. Heureusement, l’accrochage du Salon est modifié chaque mois. En décembre 1827, lors de la réouverture, le tableau enfin achevé est présenté à un public choisi. Il a été installé à la place d’honneur, au salon carré. La Naissance de Henri IV, œuvre monumentale, fait l’effet d’un coup de tonnerre. "Pour cette fois ce fut le succès le plus étonnant que l’on puisse imaginer !" notera-t-il des années plus tard dans son Journal. Les circonstances d’une création, entre politique et romantisme A l’origine du tableau, on trouve une nouvelle écrite par le frère de Victor Hugo, Abel. Les frères Hugo sont alors de fervents monarchistes. En 1820, des événements dramatiques marquent la dynastie restaurée, avec l’assassinat du duc de Berry, neveu de Louis XVIII, puis la naissance, quelques mois plus tard de son fils posthume, "l'enfant du miracle", prénommé Henri. Abel Hugo publie alors en novembre 1820 la nouvelle La Naissance de Henri IV dans sa revue Le conservateur Littéraire. Eugène Devéria, qui avec son frère Achille et son condisciple Louis Boulanger, fréquente assidûment la famille Hugo, a connaissance du texte et s’en inspire à son tour pour trouver le thème de son grand tableau. Le sujet consensuel, le traitement remarquable de la couleur, le trait juste, le pittoresque habile, la jeunesse même du peintre, tout concourt au succès éclatant du tableau en 1827. La reconnaissance officielle ne se fait pas trop attendre : en avril 1828, la peinture est achetée par le roi pour le musée du Luxembourg. Elle figure aujourd’hui encore au musée du Louvre. Le peintre en réalise lui-même la copie pour la ville de Pau. Eugène Devéria reçoit aussi plusieurs commandes officielles, mais il ne parviendra jamais à confirmer le succès de 1827. Eugène Devéria a toujours affirmé avoir peint son œuvre phare d’un seul jet, sans études ni esquisses préalables. Cette vision romantique de l’artiste créant à même la toile vierge, sous le coup de l’inspiration, est battue en brèche par l’existence de multiples dessins préparatoires au crayon ou à l’aquarelle, et d'esquisses de petit format, comme celle qui appartient aux collections du musée national. Si le groupe central apparaît quasi-inchangé, avec la figure tout de noir vêtue du grand-père brandissant triomphalement son petit-fils, et de Jeanne d’Albret et ses dames d’atours, les personnages assistant à la scène ont beaucoup évolué d’une version à l’autre.

Peinture
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Autoportrait

Vers 1863

Si le peintre Eugène Devéria connut une carrière moins brillante que celle de son frère et maître Achille, il ne faut pas oublier ses débuts fulgurants : âgé de 22 ans à peine, il créa l'événement au Salon de 1827, avec La Naissance de Henri IV, tableau monumental, dont le succès fit de lui le chef de file, très éphémère, du mouvement romantique. L'histoire du peintre est étroitement liée à Pau, ce qui explique la présence de ce bel autoportrait dans les collections du Musée national. Son oeuvre-phare, La Naissance de Henri IV le rattache à l'histoire et à la légende du roi bourbon et de son château natal. Et la vie d'Eugène Devéria fut en grande partie paloise, puisqu'après bien des vicissitudes professionnelles et personnelles, accablé de graves soucis de santé, il vint en 1841 s'installer dans la capitale du Béarn avec sa famille. Il devait y rester jusqu'à sa mort en 1865. En Béarn, Eugène Devéria découvrit une active communauté protestante. Lui-même se convertit en 1843. A partir de cette date, son engagement religieux fut total, absolu et bouleversa sa vie et celle de son entourage, qu'il s'efforça de convertir. Le peintre s'impliqua tout aussi passionnément dans la vie protestante locale : assistance aux nombreux malades, prédication, enseignement dispensé aux enfants au sein de l'Ecole du Dimanche. Ursule Stupany, à qui le peintre fit don de cet autoportrait, était l'une de ses petites élèves. Née à Pau en 1844, d'une famille plus que modeste, elle fut, après la mort de son père en 1856, prise en charge par la communauté protestante paloise. Eugène Devéria avait une immense affection pour cette enfant qu'il finit par considérer comme sa propre fille, trouvant en elle une consolation de la mort prématurée de sa fille unique, Marie. A Pau, Eugène Devéria gagnait sa vie en donnant des cours de dessin et en réalisant les portraits des membres de la bonne société, en particulier des hivernants, anglais ou hollandais, qui venaient y passer la mauvaise saison. Surtout connu pour ses grandes compositions historiques, le peintre pratiqua donc assidûment l'art du portrait. Il réalisa aussi plusieurs autoportraits à différents âges de sa vie, se représentant même dans quelques-unes de ses peintures historiques. Cet autoportrait a été peint un an à peine avant sa mort. Le peintre est figuré de trois-quarts, l'air sévère fixant le spectateur, en tout point semblable à la description que fit de lui sa première biographe, la baronne Gallot : "il y avait dans sa physionomie quelque chose d'antique et d'inspiré [...] Là nous voyons Eugène Devéria, les cheveux courts comme un puritain, le front chauve, la barbe tout-à-fait blanche et longue comme celle du Moïse traditionnel. Devéria avait les yeux noirs, le regard vif et profond ; sa taille était très élevée ; tout en lui annonçait une grande force physique, une grande énergie morale. Ses manières étaient d'une distinction parfaite, sa pose majestueuse [...]." De sa jeunesse bohème, le sévère protestant gardera jusque dans sa vieillesse un goût pour les excentricités vestimentaires dont témoigne son habit de velours rouge à boutons dorés.

Peinture
Media Name: o_peinture_henri_iv_jouant_avec_son_fils.jpg
© Château de Pau
Henri IV jouant avec son enfant ou Henri IV et l’ambassadeur d’Espagne
1905

Cette peinture de Georges Claude montre la permanence étonnante de la légende henricienne jusqu’aux toutes  premières années du XXe siècle. L’œuvre datée de 1905 reprend en effet, avec quelques variantes, le thème traité avec un immense succès près d’un siècle plus tôt, par le peintre lyonnais Pierre Revoil : Henri IV jouant avec ses enfants – ici le seul dauphin, futur Louis XIII - est surpris par l’ambassadeur d’Espagne. Le roi sans s’émouvoir demande à l’ambassadeur fort étonné s’il est lui-même père et après sa réponse positive, termine son jeu avec son fils...

On retrouve les qualités de décorateur de Georges Claude, qui travailla pour le théâtre et la Manufacture des Gobelins, dans le traitement pictural du tapis ou la reconstitution du décor intérieur d’un palais dont l’enfilade de salles n’est pas sans évoquer celles du château de Pau.