D'après les archives de la conservation, c'est le 26 novembre 1856, qu'une "table à ouvrage en laque des Indes" est envoyée au palais impérial de Pau. Destinée d'emblée au salon de famille, elle vient compléter le décor de cette pièce à l'atmosphère plus intime qui succède aux deux grands salons d'apparat du premier étage. Sous la Monarchie de juillet, la tonalité du salon de famille est d'un jaune doux, de la couleur de la soie qui habille murs, fenêtres et sièges. Autre règne, autres goûts, en 1856, on passe au rouge, avec l'installation d'un somptueux velours de soie de Gênes cramoisi, tissage réalisé dans les années 1810-1811 par l'entreprise lyonnaise Grand Frères : ce velours ciselé à motifs d'arabesques alternant fleurs et cornes d'abondance n'avait pas été utilisé sous le Premier Empire... Il le sera sous le Second. Il s'agit là de l'un des ajouts de Napoléon III, ajouts assez peu nombreux mais significatifs, à un ensemble décoratif déjà largement en place à la fin du règne de Louis-Philippe.
On ne possède guère de renseignements sur cette précieuse table à ouvrage dont la légende locale s'est emparée pour la présenter comme un cadeau fait par la reine Victoria à l'impératrice Eugénie. Si aucun document ne permet actuellement d'étayer cette hypothèse, il est certain que la table à ouvrage est un objet d'une très belle qualité, tant par sa facture, son décor que par la quarantaine d'objets d'ivoire délicatement sculptés qui y sont rangés. En 2012, la restauration de cette oeuvre par une spécialiste des objets et mobiliers en laque, Anne Jacquin, a permis, sinon d'en percer tous les mystères, du moins de mieux en comprendre le mode de fabrication. Le décor de laque et d'or est caractéristique d'une production chinoise de l'époque Qing ((1644-1911). On parle pour ce type de meubles dont une grande partie était destinée à l'exportation, de "laque de Canton". Sa datation serait à placer dans les premières décennies du XIXe siècle.