La Chapelle
Au temps des vicomtes de Béarn et des rois de Navarre, le château de Pau était bien évidemment doté d'une chapelle à l'usage du seigneur et de son entourage. Marguerite de Valois, qui fit un séjour mouvementé à Pau en mai et juin 1579, garde le souvenir d'un lieu petit et malcommode : « la chapelle, écrit-elle dans ses Mémoires, qui n'avoit que trois ou quatre pas de long, […] estant fort estroite, estoit pleine quand nous y estions sept ou huict. ». Le culte catholique étant interdit en Béarn depuis 1571, peut-être ne lui avait-on alloué qu'une petite salle à son usage exclusif et non l'ancienne chapelle castrale. Toujours est-il qu'aucun document ne permet de décrire ni de localiser précisément l'emplacement de ce lieu de culte avant les grands travaux qui transformèrent le monument à partir de 1838...
Sous la Monarchie de Juillet (1830-1848), les architectes du roi Louis-Philippe qui menaient les restaurations du château choisirent d'abord d'installer la chapelle dans l'aile nord, dans la tour Montauzer, le donjon primitif.
Puis très vite, ils décidèrent de tirer parti d’un autre bâtiment : situé à l'avant du donjon de briques de Gaston Fébus, il servait d’entrée du côté de la ville haute, grâce à un système de pont-levis disparu au début du XIXe siècle. Les murs latéraux du bâtiment, jusqu'alors indépendants du donjon Fébus, furent prolongés. On perça une porte côté nord et une fenêtre dans l'entrée de la chapelle, côté sud. Le bâtiment fut coiffé d'une toiture d'ardoises percée de chassis vitrés et mobiles offrant un éclairage zénital.
Sous le Second Empire, une tempête détruisit ces châssis et on décida alors d'ouvrir deux grandes fenêtres dans les murs nord et sud de la chapelle et de supprimer l'éclairage par le toit qui fut entièrement recouvert d'ardoises.
Un passage raccordant l'aile sud du château au donjon Fébus fut également construit pour permettre aux grands appartements du premier étage de communiquer avec la tribune de la nouvelle chapelle. Le couloir surmontant ce passage ainsi que le salon aménagé pour l'occasion au cœur du donjon Fébus portent aujourd'hui le nom de Bernadotte. Le gros œuvre du chantier était terminé dès 1840, le mobilier fut envoyé à partir de 1842 et seuls quelques travaux et aménagements complémentaires devaient être réalisés sous le Second Empire. Transformée, décorée, meublée, la chapelle fut consacrée le 24 août 1843, par l’évêque de Bayonne. Le 27 août suivant, l'un des fils de Louis-Philippe, Antoine d'Orléans, duc de Montpensier, venait à Pau inaugurer la statue d'Henri IV place royale, après avoir assisté à une messe célébrée dans la toute nouvelle chapelle du château.
Le décor de la chapelle date de la Monarchie de Juillet. Il est simple et élégant : les murs et le plafond sont de plâtre peint en faux-bois et rehaussé de dorures. Un monumental lustre à lampe en bronze de style néo-grec, décoré d'un agneau pascal, assure l'éclairage. Le mobilier qui porte des estampilles de Jeanselme ou Jacob-Desmalters est sobre et fonctionnel : banquettes, genouillères, tabourets, fauteuils, chaises sont entièrement recouverts d'un velours cramoisi, assorti aux portières de la chapelle et de la tribune. Plusieurs viennent du palais des Tuileries. Seule fantaisie dans cet ensemble décoratif d'une grande harmonie, la présence d'une hallebarde dont on retrouve la jumelle au salon d'attente au premier étage sud du château.
Le principal élément du décor est le somptueux vitrail réalisé en 1841 à la Manufacture de Sèvres par le peintre-verrier Pierre Marie Roussel, d’après le tableau de l’espagnol Francisco de Zurbaran, L’Adoration des bergers (1636). On sait le goût de Louis-Philippe pour la peinture espagnole, le choix du sujet ne lui fut pas étranger. La scène est tirée du Nouveau testament, de l'Evangile selon Saint Luc et montre des bergers des environs de Bethléem se prosternant devant l'enfant Jésus dans la crèche.
Le décor fut complété dans la seconde moitié du XIXe siècle par l’envoi de deux grands tableaux à sujets religieux, La mise au tombeau de Joseph Chautard (1866) et Le retour du calvaire (1873) de Jules-Joseph Meynier. Au début des années 1980, un vitrail à thème profane, représentant Henri IV caracolant, réalisé en 1884 par les ateliers Mauméjan a été placé dans l'entrée de la chapelle.
Une dernière surprise attend les visiteurs de ce lieu : le blason de pierre aux armes de Gaston III de Foix-Béarn, dit Gaston Febus (1331-1391). Il s'agit d'un bas-relief rectangulaire encadré de moulures saillantes, qui comprend dans sa partie inférieure un écu aux armoiries écartelées de Foix et de Béarn, et dans sa partie supérieure l’inscription, ici très effacée, Febus me fe, dont le comte-soleil signait ses forteresses. Surmontant initialement l’accès occidental de ce bâtiment, il fut déplacé lors de sa transformation en chapelle sous Louis-Philippe. Peu accessible, le blason est aujourd'hui visible depuis la tribune.