Un projet de cadeau diplomatique est à l'origine de la tenture de l'Histoire d'Henri IV tissée par la Manufacture des Gobelins à la fin du XVIIIe siècle. En mai et juin 1782, le grand-duc Paul, héritier du trône de Russie et futur tsar Paul 1er et son épouse Marie Féodorovna séjournèrent à la cour de France, où il furent somptueusement reçu. Le grand duc étant amateur des tissages des Gobelins, il fut décidé de lui offrir une tenture spécialement créée pour l'occasion. Quel meilleur thème pour ces tapisseries que l'histoire d'Henri IV, glorieux aïeul du roi Louis XVI ?
Le comte d'Angiviller, directeur des Bâtiments, Arts, Jardins et Manufactures de France, commanda donc au peintre François-André Vincent quatre tableaux glorifiant Henri IV, d'après lesquels faire tisser par les Gobelins une suite de tapisseries : deux scènes devaient représenter le roi seul, deux le roi avec son ministre Sully. Vincent s'exécuta entre 1783 et 1785. Il reçut alors la commande supplémentaire de deux tableaux mettant en scène le roi Bourbon et sa maîtresse Gabrielle d'Estrées. Le peintre emprunta ses sujets à trois œuvres littéraires très en vogue en cette fin du XVIIIe siècle : La Henriade, poème épique de Voltaire, les Mémoires de Sully et La partie de chasse de Henri IV, pièce de théâtre de Charles Collé. La tenture complète devait se composer des six pièces suivantes : Henri IV faisant livrer des vivres à Paris assiégé ; Les adieux d'Henri IV et de Gabrielle d'Estrées ; L'évanouissement de Gabrielle; Henri IV rencontrant Sully blessé ; Henri IV relevant Sully ; Henri IV et le meunier Michaud.
ll semble que cette tenture destinée au grand-duc ne fut que partiellement tissée et qu’elle ne lui parvint jamais. Au début de l’Empire, puis sous la Restauration, le tissage de deux nouvelles tentures d’après les cartons de Vincent fut entrepris. Le Mobilier National conserve aujourd’hui encore quatre pièces, revenues du château de Pau en 1896, tandis que six autres se trouvent toujours au château, où cinq sont présentées dans le couloir Bernadotte. Le rattachement de ces pièces à une tenture précise reste difficile.